Jacques JOLFRE (1937-2020)
Né le 9 juin 1937, à Toulouse, Jacques Jolfre a suivi ses parents à Montréjeau où son père installa l’entreprise familiale de fabrication de chaussures. Adolescent, vers l’âge de 13 ou 14 ans, il emprunta à la bibliothèque de Montréjeau « Dix ans sous terre », livre écrit par Norbert Casteret, qui lui révéla un univers inconnu et lui fit découvrir une pratique sportive exigeante. Naquit alors une passion pour la spéléologie et les Pyrénées qui devait animer son existence.
Le jeune homme visite les grottes et gouffres accessibles au plus près du domicile familial dans le piémont commingeois. Le 24 juin 1956, explorant la grotte de Tibiran, il découvre sur les parois des peintures préhistoriques de mains rouges, semblables à celles bien connues de la grotte de Gargas, située dans la même colline. Il fait part de cette découverte à Norbert Casteret qu’il rencontre pour la première fois chez lui près de Saint Gaudens. Il l’invite à rejoindre son équipe. Les deux hommes se lient d’amitié malgré les quelques quarante ans qui les séparent. Une passion commune et une amitié nées de la lecture d’un livre. Dès lors, Jacques Jolfre n’a de cesse de vivre pleinement cette passion et de la partager, comme le faisait Norbert Casteret, à travers articles, livres et conférences. Pour cela, à l’image des carnets son maître, il tient un journal de ses explorations menées en parallèle d’une vie professionnelle qui commence à l’ORTF avant de travailler pour l’entreprise Pechiney à Lannemezan et Marignac. Il réside aux Tourreilles, surplombant Montréjeau, en belvédère face aux Pyrénées, non loin du Valmirande de Bertrand de Lassus, dans une maison ouverte à celles et ceux qui partagent sa passion et qu’il accueille avec bonhomie.
Jacques Jolfre a réalisé plus de 900 descentes dans des karsts et des grottes d’altitudes avec une prédilection pour le gouffre d’Esparros dont il veille à la préservation et qu’il visita et fit visiter près de 200 fois. Il réalise de nombreuses ascensions, effectue la traversée des Pyrénées d’Hendaye à Port-Vendres en 1972 et participe au recensement des 3000 des Pyrénées initié par Juan Buyse. Il pratique aussi le deltaplane en solo ou en biplace. Photographe, il documente ses sorties de près de 50 000 clichés qui lui permettent d’illustrer pas moins de 36 livres publiés par Milan, Sud-Ouest, et Rando Éditions. Son premier livre L’appel des profondeurs est publié chez Marabout en 1965. En 1992, grâce aux éditions Milan et au concours de ses amies, Marie, Maud et Gilberte, les filles de Norbert Casteret, il publie Norbert Casteret. Explorateur d’abîmes, livre-hommage à celui qui fut son père spirituel. Il contribue aussi à de nombreuses publications périodiques : plus de 650 articles dans Respyr, la Revue Pyrénéenne, Pyrénées, Pyrénées Magazine, Alpirando, Montagnes Magazine, Détours en France, Balades en France, Géo, Sélection du Reader’s Digest Atlas, Ici et Là, Science et Avenir, Archeologia… et la Revue de Comminges, par un premier article paru dès 1960 sur les « Grottes et gouffres dans la vallée de l’Arize », et deux textes sur « La mystérieuse grotte de Trédjaloungo (commune d’Aventignan, Hautes-Pyrénées) » et sur « Arbas : La montagne creuse » en 1997. L’archéologie n’était pas son but mais, comme N. Casteret, son intimité avec les Pyrénées souterraines lui a permis de belles découvertes. Dans les années 1980, il confia sa collection d’objets et d’ossements préhistoriques à la commune d’Aventignan qui l’exposait dans le petit musée des grottes de Gargas. Pour la communauté des spéléologues pyrénéens Jacques Jolfre était devenu une référence et ses camarades donnèrent ses initiales à un gouffre d’altitude dans le massif du Marboré près de Gavarnie : le gouffre JJ qui s’enfonce à près -585 mètres. Aussi discret et modeste que reconnu dans le monde de la spéléologie et du pyrénéisme, Jacques Jolfre est une figure du Comminges qui laisse le souvenir d’un homme entier, d’un sportif et d’un passeur de talent. Il s’est éteint à 83 ans le 30 septembre 2020.
Yoan Rumeau
Commentaires récents