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Un long siècle d’exils. Proscrits, apatrides, réfugiés, (r)apatriés des années 1870 aux années 1980 par Thomas FERRER
Un long siècle d’exils. Proscrits, apatrides, réfugiés, (r)apatriés des années 1870 aux années 1980.
Thomas FERRER
Cairn 2022. 346 pages, 22 euros.
ISBN : 978-2-35068-929-6
Un livre très riche, passionnant qui fait une large synthèse des mouvements de population que la Bigorre a connus au long des XIXe et XX° siècles en commençant par les passages de la frontière par les carlistes espagnols à partir des années 1830 pour arriver jusqu’aux boat-peoples vietnamiens de la fin des années 70 fuyant le régime communiste.
Thomas Ferrer change d’échelle systématiquement et avec aisance : du niveau international, en passant par le niveau national jusqu’au local pour descendre régulièrement à l’échelle des hommes et des femmes qui ont vécu les déracinements liés à l’histoire récente. Ces cas individuels envisagés donnent une épaisseur humaine à chaque chapitre du livre et nous ramènent à la réalité la plus sensible.
Au travers des tragédies successives du XX° siècle et des larges mouvements de population qu’elles ont suscités, on suit les réactions des gouvernements français successifs, hésitants, improvisant des solutions et tentant de ne pas mécontenter les gouvernements de Franco, Mussolini ou Hitler par un accueil trop voyant de leurs opposants ; on suit aussi les réactions des populations compatissantes ou inquiètes, partageant, accueillantes ou évitant le contact, selon la nature des arrivants. On voit surtout se multiplier et durer les camps qui vont servir longtemps pour héberger et contrôler ces arrivées successives et plus ou moins suspectes. Le XX° siècle restera le siècle des camps.
Thomas Ferrer fait aussi le point sur les exodes massifs de l’après-guerre en particulier sur le retour des prisonniers, des déportés avant celui des populations chassées des anciennes colonies françaises par la fin de l’Empire et on mesure combien le sud-ouest a pris sa part dans leur rapatriement.
Le livre se clôt sur les arrivées importantes de réfugiés chiliens après le coup d’état du 11 septembre 1973 qui permit à Pinochet de prendre le pouvoir et celles des boat-peoples vietnamiens qui provoquèrent la réconciliation franco-française de Jean-Paul Sartre et de Raymond Aron. Il y a là de quoi donner matière à réflexion sur l’inquiétude récente liée aux mouvements migratoires de notre début de XXI° siècle.
C’est aussi (et encore) une belle réussite de l’édition Cairn : un livre très agréable à manier. Un utile rappel des très nombreux sigles utilisés et une biographie abondante encadrent le texte. De belles et émouvantes photographies prises dans les années 30 par Germaine Chaumel illustrent le propos général du livre. On y voit les républicains espagnols lors de la Retirada, les réfugiés de l’exode de l’an 40 entre autres exemples de ces flux de réfugiés.
François Stein
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